Le délai décennal de l'article 1792-4-3 est un délai de forclusion !
Publié le :
24/03/2022
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Le Cabinet revient sur un arrêt important de l’année 2021 qui considère pour la première fois que le délai de dix ans de l’article 1792-4-3 du Code civil, applicable aux actions en responsabilité contractuelle de droit commun pour faute prouvée, est un délai de forclusion (Cass, civ 3ème, 10 juin 2021, n°20-16.837).
En l’espèce, en juin 2003, un couple a confié des travaux de réfection de leur terrasse à une entreprise.
Se plaignant de désordres, ils ont obtenu, en octobre 2011, un accord de l’entreprise pour réaliser les travaux de réparation.
Malgré ces travaux de reprise, les désordres ont persisté, à un tel point que les maîtres d’ouvrage ont assigné en juin 2016 l’entreprise de construction, laquelle a appelé en garantie son assureur.
Devant la Cour d’appel, l’assureur a soulevé la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action des maîtres d’ouvrage.
L’assureur soutenait que le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs sur le fondement de l’article 1792-4-3 du Code civil était un délai de forclusion, qui n’est pas, en principe, régi par les dispositions concernant la prescription et notamment par l’effet interruptif de la reconnaissance de responsabilité du constructeur.
La Cour d’appel n’a pas suivi son raisonnement et l’a condamné in solidum avec son assuré à indemniser les maîtres d’ouvrage.
La Cour d’appel a considéré que le protocole d’accord conclu entre les maîtres d’ouvrage et l’entreprise de construction en octobre 2011 s’analysait en une reconnaissance de responsabilité ayant un effet interruptif de prescription du délai décennal de l’action en responsabilité contre les constructeurs pour les dommages intermédiaires.
La Haute Juridiction a censuré le raisonnement des juges du fond au visa des articles 1792-4-3, 2220 et 2240 du Code civil.
La Cour de cassation a tout d’abord rappelé que le législateur avait entendu harmoniser les deux régimes de responsabilité que sont la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs et la responsabilité décennale, en alignant les deux régimes quant à la durée et à leur point de départ.
La Cour de cassation a également précisé qu’elle avait précédemment jugé que le délai de la garantie décennale de l’article 1792 du Code civil était un délai d’épreuve, soit un délai de forclusion (Cass, civ 3ème, 12 novembre 2020, n°19-22.376).
Ce faisant, la Cour de cassation en a déduit que le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs sur le fondement de l’article 1792-4-3 du Code civil au titre de la responsabilité contractuelle est un délai de forclusion, qui n’est donc pas régi par les dispositions concernant la prescription, et que dès lors la reconnaissance par le débiteur de sa responsabilité n’interrompt pas le délai de forclusion.
C’est la première fois que la Cour de cassation se prononce sur la nature du délai de dix ans de l’article 1792-4-3 du Code civil, et considère qu’il s’agit, à l’instar de la garantie décennale de l’article 1792 du Code civil, d’un délai de forclusion.
De par cette décision, la Haute Juridiction témoigne de sa volonté d’unifier le régime de la responsabilité de droit commun des constructeurs de l’article 1792-4-3 du Code civil avec celui de la garantie décennale de l’article 1792 du Code civil.
Surtout, la conséquence immédiate de cette solution est que le délai de dix ans de l’article 1792-4-3, ne sera par principe pas affecté par les évènements qui surviennent pendant sa durée, sauf dispositions contraires prévus par la loi.
Comme le souligne l’arrêt commenté, le délai de l’article 1792-4-3 du Code civil n’est donc pas interrompu par la reconnaissance de responsabilité du constructeur.
Mais là n’est pas la seule conséquence de cet arrêt.
En cas d'assignation en référé expertise, l'ordonnance du juge faisant droit à une mesure d'expertise n'aura aucun effet suspensif du point de vue de la responsabilité des constructeurs sur le fondement de l’article 1792-4-3, l'article 2239 du Code civil étant exclusivement applicable aux délais de prescription.
Ladite assignation aura seulement un effet interruptif de forclusion qui subsistera jusqu’au prononcé de l’ordonnance, date à laquelle un nouveau délai décennal commencera à courir.
Historique
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